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DROIT BANCAIRE - La double question de la durée de la prescription et de son point de départ tranchés... Par Maître Florence Auby

Publié le : 04/03/2016 04 mars mars 03 2016

Le 10 juillet 2014 , la 1° chambre civile de la Cour de Cassation(civ 1ère num 13-511) avait jeté un pavé dans la mare des banques  dispensatrices de crédit immobilier et avait jugé utile d’aligner la prescription relative à un crédit immobilier à celui de tout crédit, notamment celui lié à la consommation, qui , comme chacun sait revêt un caractère profondément protecteur .
 
La solution retenue était désormais que la prescription de tout crédit quel que soit sa nature était biennale, sur le fondement de l’article L 137-2 du code de la consommation qui précise  que
« l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans. »
 
Cette décision clôturait le débat  lancé par le législateur qui avait inséré cet article dans le code de la consommation,  ce qui avait laissé penser à certains qu’il n’était pas de portée générale et ne s’appliquait notamment pas au crédit immobilier, couvert lui par le délai de 5 ans de l’article 2224 du Code Civil.
 
Le deuxième point abordé par la Cour de Cassation en 2014 concernait le point de départ de la prescription.
 Classiquement en matière de crédit immobilier, était retenue la date de la déchéance du terme, prononcée par l’organisme dispensateur de crédit .
 
C’est sur ce  point que l’Arrêt de la Cour était  plus que novateur , car les magistrats de la Haute juridiction avaient décidé d’aligner ce point de départ à celui applicable en matière de crédit à la consommation, à savoir à compter de la première échéance impayée non régularisée.
 
Cet arrêt posait de nombreuses questions non résolues et fragilisait la position des banques qui se pensaient légitimement à l’abri de la prescription en ayant agi postérieurement à l’exigibilité de la créance, et ce d’autant plus que la Cour rejetait ainsi toute action concernant tant les échéances impayées que le capital restant dû.
Cette sanction était sévère pour les banques qui si elle se voyaient annuler comme dans le cas évoqué dans l arrêt de la cour de cassation , annuler leur commandement ,elles ne bénéficiaient d’une seconde chance que si elles avaient  accomplis des actes  interruptifs de prescription
 
Il était nécessaire que la Cour se prononce à nouveau.
 
C’est ce qu’elle a fait le 11 février dernier, et … à quatre  reprises .
 
La nouvelle position de la Cour de Cassation est la suivante :
 
 
 
 
 
 
 
 
  1. Le délai de prescription est bien de deux ans.
 
La Cour a retenu sans aucune équivoque que l’article L 137-2 du code de la consommation s’applique, de sorte que le délai de prescription applicable, même en matière de crédit immobilier, est bien  de deux ans.
 
Elle a estimé que
 
« l’article L 137-2 du code de la consommation édicte une règle de portée générale ayant vocation à s’appliquer à tous les services financiers consentis par des professionnels à des particuliers, de sorte que c’est à juste titre que les emprunteurs ont invoqué ce texte, la nature du prêt, immobilier ou de trésorerie, étant indifférente. »
 
 
  1. Le point de départ du délai de prescription court à l’égard de chacune des fractions à compter de l’échéance considérée
 
La Cour de Cassation revient sur sa position  de 2014 et censure les Cours d’Appel qui retenaient comme point de départ la première échéance impayée.
 
Ainsi, elle sanctionne  des arrêts qui,pour déclarer prescrites l’action de banques ,avaient retenu que
 
  • la défaillance de l’emprunteur, s’agissant d’une inexécution contractuelle, est l’événement qui constitue le point de départ nécessaire mais suffisant du délai d’action sans que celle-ci soit subordonnée au prononcé de l’exigibilité anticipée du terme,
 
  • le point de départ du délai de prescription se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer l’action concernée, soit, dans le cas d’une action en paiement au titre d’un crédit immobilier consenti par un professionnel à un consommateur, à la date du premier incident de paiement non régularisé
 
Désormais, il est acquis que le point de départ de la prescription est celui qui s’applique dans le cadre d’une dette payable par termes successifs.
 
La Cour  précise ainsi que
 
« la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité.
 
Il y a donc autant de points de départs de prescription qu’il existe de faits ayant déclenché ceux-ci.
 
La solution est sécurisante pour les banques qui si elles agissent pour le capital restant dû notamment, et après déchéance du terme, dans le délai de deux ans, ne se verront pas opposer la prescription pour la créance totale.
 
Elles pourront  toujours se voir opposer cette prescription pour des échéances impayées pour lesquelles aucune action n’aurait été entreprise dans le délai de deux ans.
 
 
 
Mais cette prescription ne concernera que les échéances visées et non le capital restant dû, par essence due à compter de la déchéance du terme et ce ,  si l’action concernant le capital est bien introduite dans les deux ans.
 
En conclusion, pour éviter toute prescription, il convient d’agir sous un délai de deux ans, tant en ce qui concerne les échéances impayées que le capital restant dû.
 
 
 
FLORENCE AUBY AVOCAT MONTPELLIER
 
Arrêts cour de cassation 1ère ch civile  14-22.938,14-28.383,14-27.143,14-29.539
DROIT BANCAIRE
La double question de la durée de la prescription et de son point de départ tranchés par quatre arrêts de la 1° Chambre civile de la Cour de Cassation rendus le 11 février 2016
 
 
Le 10 juillet 2014 , la 1° chambre civile de la Cour de Cassation(civ 1ère num 13-511) avait jeté un pavé dans la mare des banques  dispensatrices de crédit immobilier et avait jugé utile d’aligner la prescription relative à un crédit immobilier à celui de tout crédit, notamment celui lié à la consommation, qui , comme chacun sait revêt un caractère profondément protecteur .
 
La solution retenue était désormais que la prescription de tout crédit quel que soit sa nature était biennale, sur le fondement de l’article L 137-2 du code de la consommation qui précise  que
« l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans. »
 
Cette décision clôturait le débat  lancé par le législateur qui avait inséré cet article dans le code de la consommation,  ce qui avait laissé penser à certains qu’il n’était pas de portée générale et ne s’appliquait notamment pas au crédit immobilier, couvert lui par le délai de 5 ans de l’article 2224 du Code Civil.
 
Le deuxième point abordé par la Cour de Cassation en 2014 concernait le point de départ de la prescription.
 Classiquement en matière de crédit immobilier, était retenue la date de la déchéance du terme, prononcée par l’organisme dispensateur de crédit .
 
C’est sur ce  point que l’Arrêt de la Cour était  plus que novateur , car les magistrats de la Haute juridiction avaient décidé d’aligner ce point de départ à celui applicable en matière de crédit à la consommation, à savoir à compter de la première échéance impayée non régularisée.
 
Cet arrêt posait de nombreuses questions non résolues et fragilisait la position des banques qui se pensaient légitimement à l’abri de la prescription en ayant agi postérieurement à l’exigibilité de la créance, et ce d’autant plus que la Cour rejetait ainsi toute action concernant tant les échéances impayées que le capital restant dû.
Cette sanction était sévère pour les banques qui si elle se voyaient annuler comme dans le cas évoqué dans l arrêt de la cour de cassation , annuler leur commandement ,elles ne bénéficiaient d’une seconde chance que si elles avaient  accomplis des actes  interruptifs de prescription
 
Il était nécessaire que la Cour se prononce à nouveau.
 
C’est ce qu’elle a fait le 11 février dernier, et … à quatre  reprises .
 
La nouvelle position de la Cour de Cassation est la suivante :
 
 
 
 
 
 
 
 
  1. Le délai de prescription est bien de deux ans.
 
La Cour a retenu sans aucune équivoque que l’article L 137-2 du code de la consommation s’applique, de sorte que le délai de prescription applicable, même en matière de crédit immobilier, est bien  de deux ans.
 
Elle a estimé que
 
« l’article L 137-2 du code de la consommation édicte une règle de portée générale ayant vocation à s’appliquer à tous les services financiers consentis par des professionnels à des particuliers, de sorte que c’est à juste titre que les emprunteurs ont invoqué ce texte, la nature du prêt, immobilier ou de trésorerie, étant indifférente. »
 
 
  1. Le point de départ du délai de prescription court à l’égard de chacune des fractions à compter de l’échéance considérée
 
La Cour de Cassation revient sur sa position  de 2014 et censure les Cours d’Appel qui retenaient comme point de départ la première échéance impayée.
 
Ainsi, elle sanctionne  des arrêts qui,pour déclarer prescrites l’action de banques ,avaient retenu que
 
  • la défaillance de l’emprunteur, s’agissant d’une inexécution contractuelle, est l’événement qui constitue le point de départ nécessaire mais suffisant du délai d’action sans que celle-ci soit subordonnée au prononcé de l’exigibilité anticipée du terme,
 
  • le point de départ du délai de prescription se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer l’action concernée, soit, dans le cas d’une action en paiement au titre d’un crédit immobilier consenti par un professionnel à un consommateur, à la date du premier incident de paiement non régularisé
 
Désormais, il est acquis que le point de départ de la prescription est celui qui s’applique dans le cadre d’une dette payable par termes successifs.
 
La Cour  précise ainsi que
 
« la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité.
 
Il y a donc autant de points de départs de prescription qu’il existe de faits ayant déclenché ceux-ci.
 
La solution est sécurisante pour les banques qui si elles agissent pour le capital restant dû notamment, et après déchéance du terme, dans le délai de deux ans, ne se verront pas opposer la prescription pour la créance totale.
 
Elles pourront  toujours se voir opposer cette prescription pour des échéances impayées pour lesquelles aucune action n’aurait été entreprise dans le délai de deux ans.
 
 
 
Mais cette prescription ne concernera que les échéances visées et non le capital restant dû, par essence due à compter de la déchéance du terme et ce ,  si l’action concernant le capital est bien introduite dans les deux ans.
 
En conclusion, pour éviter toute prescription, il convient d’agir sous un délai de deux ans, tant en ce qui concerne les échéances impayées que le capital restant dû.
 
 
 
FLORENCE AUBY AVOCAT MONTPELLIER
 
Arrêts cour de cassation 1ère ch civile  14-22.938,14-28.383,14-27.143,14-29.539
 

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